L'ASTP, une histoire en plusieurs épisodes
Au début des années 1960, l’Etat, engagé depuis plusieurs années dans l’aventure de la décentralisation et le développement d’un secteur théâtral subventionné, infléchit sa politique à l’égard du Théâtre Privé. A l’époque, les coûts de plus en plus élevés de production et d’entretien du patrimoine immobilier des théâtres occasionnent des difficultés récurrentes parmi les salles privées. La réponse des pouvoirs publics consistait jusque-là en un saupoudrage d’aides financières accordées parcimonieusement, au risque de la subjectivité et d’une relative inefficacité, ne garantissant en aucune façon la pérennité du Théâtre Privé en tant que secteur artistique à part entière.
La création de l'ASTP en 1964 : un véritable besoin
En 1964, la création de l’ASTP apporte une solution plus structurée. Placée sous l’autorité de la Direction du Théâtre au sein du Ministère de la Culture dirigé par André Malraux, l’ASTP se voit confier une première mission : offrir, sur proposition d’un comité de sélection, des « garanties » aux exploitants de spectacles nouveaux, permettant de résorber partiellement leurs éventuels déficits. D’emblée, la vocation « assurantielle » de l’ASTP est-elle ainsi affirmée.
La Direction du Théâtre du Ministère de la Culture gère alors elle-même ce dispositif permettant d’apporter un soutien ciblé aux théâtres et de mieux assurer la pérennité de leur exploitation.
Pierre Brasseur et Maria Casarès, en 1950, dans Le diable et le bon dieu de Jean-Paul Sartre au Théâtre Antoine.
Après huit ans d’expérience, le mécanisme a prouvé son efficacité et les acteurs du secteur théâtral privé se sont imposés comme les interlocuteurs crédibles du Ministère : en 1971, une réforme essentielle renforce l’autonomie de l’ASTP en impliquant beaucoup plus fortement les professionnels dans l’administration de l’Association.
Symboliquement, la présidence est désormais confiée à un directeur de Théâtre, Denis Maurey, directeur du théâtre des Variétés.
Dans le même temps, la Ville de Paris intègre les instances de l’Association et renforce sa participation financière, jusqu’alors limitée au seul domaine de l’équipement.
Jacques Weber en Cyrano de Bergerac, mis en scène par Jérôme Savary au Théâtre Mogador en 1983.
Au-delà d’une volonté politique, l’évolution progressive de la fiscalité des salles de spectacles entre 1961 et 1971, a facilité un tel transfert de responsabilités. En une décennie décisive, la suppression de la taxe locale et du droit de timbre, puis la suppression de la taxe sur les salaires ont radicalement changé la donne. En 1971, le théâtre peut enfin bénéficier de l’application d’un taux de TVA minoré et récupérable.
Il s’avère désormais possible de mettre en place une taxe parafiscale sur les spectacles, assise sur leurs recettes : la perception de cette taxe par l’ASTP alimente un budget commun sur lequel repose le système central de la garantie de déficit.
Un système en constante adaptation
Cette aide à l’exploitation des spectacles reste encore le mécanisme central du Fonds de soutien, mais, au fil des années, l’ASTP a développé toute une gamme d’aides ciblées. Son domaine d’intervention s’est élargi à de nouvelles missions : l’aide à la création, l’aide à l’emploi, l’aide aux tourneurs et, plus récemment, l’aide à la reprise, sont venues compléter le dispositif initial.
Autre étape décisive : l’adoption en 2001 de la nouvelle « Loi organique relative à la loi de finances » (LOLF) a entériné la suppression des taxes parafiscales au 31 décembre 2003. Dans ce contexte, les pouvoirs publics ont décidé de confier à l’ASTP la perception d’une taxe désormais de nature fiscale, dont les ressources lui sont affectées, reconnaissant ainsi la véritable mission de service public dévolue à l’Association.
Michel Roux au Théâtre du Palais Royal en 2005 dans la pièce de Robert Lamoureux, Le charlatan, mise en scène par Francis Joffo.
C’est ainsi que l’article 77 de la loi de finances rectificatives pour 2003 instaure une « taxe sur les spectacles perçue au profit de l’ASTP, afin de soutenir la création théâtrale, la production de spectacles d’art dramatique, lyrique et chorégraphique, la promotion et la diffusion des œuvres dramatiques lyriques et chorégraphiques en direction du public le plus large possible ».
Depuis le 1er janvier 2024, les articles L452-14 à L452-27 du Code d'imposition sur les biens et services et les articles 9 à 11-1 de l'ordonnance de 1945 relative aux spectacles encadrent l'activité de l'ASTP et la taxe sur la billetterie des spectacles.
Plus récemment, le rôle décisif joué par l’ASTP dans la sauvegarde d’un secteur théâtral privé a été mis en lumière par un audit réalisé en 2005 par les services de l’Inspection du Ministère de la Culture et de la Ville de Paris. Cet audit a remis en perspective l’importance du Théâtre Privé en termes d’offre de spectacles et de fréquentation, tout en préconisant une réforme sensible des principaux mécanismes d’intervention de l’Association, dans un sens plus conforme aux principes régissant l’économie du Théâtre Privé.
Largement concertée avec la profession, cette réforme été votée et mise en application en 2007.